Moment de bonheur quand je me pose dans un endroit qui associe vue généreuse sur le paysage, solitude et sentiment, important pour moi, de ne gêner personne. Même si regarder un coucher de soleil de son lit est un pur bonheur, je n’impose pas la présence du fourgon aux promeneurs et promeneuses du chemin. Je veille à ne pas gâcher le paysage. Depuis ma dernière chronique beaucoup de lieux, de rencontres, de lectures, d’événements. Heureusement je note tout dans un carnet. Il y aura eu les quelques jours passés chez des ami.es vers Brioude ponctués par des balades, des repas bavards et le coup de main donné pour rentrer du bois. Il y aura eu Stéphanie de l’improbable boucherie à Queuille. Il y aura eu une belle bosse à l’arrière du fourgon due à je ne sais qui parti sans laisser de message – évidemment.
Et il y a le retour à Saint-Marc pour le Mai des arts : le temps d’un week-end, sept jardins qui s’ouvrent au public et proposent œuvres d’arts, activités manuelles, produits locaux puis, le soir, tout le monde se retrouve à la Villa Plaisance pour partager nourriture, boissons, lectures, musique et vue sur l’estuaire de la Loire qui quelques mètres en aval devient océan. La pluie est tombée avant et après l’événement – Ouf. Une infection O.R.L accompagnée d’une toux fatigante et ingérable, m’a pompée beaucoup d’énergie. Le fourgon sent les huiles essentielles et j’ai lutté ferme contre l’invasion avec la trouille de ne pas réussir à donner ma lecture du samedi – Re-ouf ! Avec la complicité du musicien Yann Féry, j’ai pu traverser Mère éléphante sans toux et sans larmes ( c’est un texte où je dois maîtriser mes émotions personnelles pour tenir le cap de la lecture). La réaction du public aura mis du baume sur mes cordes vocales. Résumer ces deux jours n’a rien d’évident, ce fut en tout cas formidable de partager l’engagement de nombreux de bénévoles, d’offrir un moment de plaisir aux passantes et passantes du littoral. Du beau boulot ! Maud Leroy des éditions Des Lisières était là et ses livres aussi. Elle sera ensuite l’hôte de mon fourgon le temps de quelques rencontres vers Orvault. Vivre de peu. Vivre intensément. Et il m’arrive de dire merci à je ne sais qui, à je ne sais quoi pour mon bonheur d’être au monde. Jouir de la vie car d’autres, pas si loin de nous, subissent la guerre au quotidien. La violence de là-bas qui contraste avec la légèreté du soleil matinal hôte de mon fourgon. A la radio, un paysan ukrainien raconte qu’il devrait, à cette époque de l’année, préparer la terre pour recevoir des semences, mais cela ne sera pas possible. Ses champs sont infestés de mines. Pourquoi ce récit m’a-t-il particulièrement émue, je ne saurais dire. Peut-être le tangible de la situation. Ensemencer est un moment tendu vers l’avenir, on y puise du courage pour se mettre au labeur, et voilà que, pour cet homme, l’avenir est un terrain miné ! A Saint – Marc on ouvre les jardins, en Ukraine on condamne l’accès aux champs.